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[nettime-fr] La nouvelle carte d'identité met la puce à l'oreille de la Cnil


Selon la Commission nationale informatique et libertés, le projet de 
documents infalsifiables à données biométriques présenterait des dangers 
de fichage.
La nouvelle carte d'identité met la puce à l'oreille de la Cnil
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Par Patricia TOURANCHEAU
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jeudi 21 avril 2005 (Liberation - 06:00)
http://www.liberation.fr/page.php?Article=291177


Le programme d'identité nationale électronique sécurisée (Ines), qui 
envisage de ficher au niveau national des données biométriques 
personnelles (empreintes digitales, forme du visage, voire iris de 
l'oeil) des citoyens, suscite d'ores et déjà /«d'extrêmes réserves»/ de 
la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). Le 
Premier ministre a approuvé, le 11 avril, ce projet de loi annoncé en 
fanfare dans/ France-Soir/ par Dominique de Villepin. Le ministre de 
l'Intérieur n'a pas encore saisi la Cnil pour obtenir son avis. Il 
envisage néanmoins de soumettre le projet au Conseil des ministres dès 
le mois de juin et au parlement à l'automne 2005. Et compte lancer le 
passeport biométrique en septembre 2006, la carte d'identité début 2007, 
puis les titres de séjour des étrangers et les permis de conduire en 2008.

*Authentification.* Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001 
à New York, les Etats-Unis et l'organisation de l'aviation civile 
internationale exigent des visiteurs étrangers des passeports avec un 
élément biométrique, une photographie numérisée. A la frontière, le 
voyageur soumet son visage à un lecteur électronique de reconnaissance 
faciale pour une authentification. Zélée, la France envisage, elle, 
d'aller bien plus loin. Un règlement européen du 13 décembre 2004 impose 
certes /«d'insérer dans une puce la photographie du titulaire et ses 
empreintes digitales»/ dans les passeports et les visas. Mais 
l'intégration de données biométriques /«ne s'applique pas aux cartes 
d'identité délivrées par les/ /Etats membres à leurs ressortissants»/, 
stipule le règlement. Or, le ministère de l'Intérieur français concocte 
une carte nationale d'identité électronique (Cnie) qui stocke dans sa 
puce un cliché et deux traces de doigt numérisées. De plus, ce document 
serait «payant» et «obligatoire» pour tout citoyen âgé de plus de 12 
ans. François Giquel, commissaire à la Cnil, se montre déjà très 
circonspect sur /«l'utilisation de la biométrie comme preuve d'identité» 
/: /«Ce n'est plus un carton ou un code secret, mais un élément intime 
de votre corps qui devient un identifiant. Si on exige de la personne 
comme preuve définitive de montrer un oeil, un doigt ou un visage, vous 
êtes marqué à /vie/, c'est une révolution sociale.» /

D'autant que le ministère de l'Intérieur compte aussi centraliser et 
stocker ces données dans trois grands fichiers nationaux : l'un pour les 
empreintes digitales, l'autre pour les photographies, le dernier pour 
les titulaires de documents d'identité. Sans compter un fichier d'état 
civil exhaustif qui comporterait aussi les domiciles. Auditionné par la 
Cnil sur ce projet Ines, le magistrat honoraire Louis Joinet, lui-même 
ancien de la Cnil ayant enquêté sur le fichier des juifs, a souligné/ 
«le danger de tels fichiers informatisés de populations avec les 
adresses qui, s'ils avaient existé entre 1940 et 1945, n'auraient pas 
permis à des juifs d'échapper aux rafles». /De plus,/ /Me Alain Weber 
pour la Ligue des droits de l'homme (LDH) ne considère pas/ «comme une 
garantie la prétendue séparation de ces différents fichiers aux mains de 
l'Etat. Il y a des risques évidents d'interconnexion»./ Alex Türk, 
président de la Cnil, s'est déclaré hier /«préoccupé» /par la 
/«constitution de bases centrales, par la traçabilité possible par les 
empreintes de nos concitoyens et par les autres usages éventuels»/ de 
ces fichiers à des fins policières. Il a dénoncé /«les dérives» /de 
l'utilisation en 2004 de fichiers de police, tel le Stic (Système de 
traitement des infractions constatées) qui, à cause /«d'informations 
erronées ou trop vieilles»/, ont bloqué l'embauche de candidats à des 
postes de sécurité. Ainsi, la Cnil a vérifié pour 254 requérants les 
renseignements inscrits dans le Stic et a constaté des /«erreurs» /pour 
67 d'entre eux, soit /«dans 26 % des cas»./

*«Fiabiliser la source».* La Cnil émet des doutes quant à la/ «véritable 
finalité»/ de l'Ines, alors que «/la carte d'identité actuelle, dite 
Pasqua, est déjà infalsifiable», /souligne François Giquel. 
Officiellement, le ministère de l'Intérieur invoque /«la lutte contre la 
fraude à l'identité et à l'immigration clandestine»/. Mais, selon le 
commissaire de la Cnil, /«la fraude se situe surtout en amont par des 
vols de titres vierges et la délivrance indue de certificats d'état 
civil»/ à ceux qui se font passer pour d'autres. Or, dès 1986, la Cnil a 
préconisé que /«les mairies transmettent directement aux préfectures les 
actes de naissance»/, et non plus aux demandeurs eux-mêmes,/ «cela n'a 
jamais été appliqué. Commençons donc par fiabiliser la source»./ Ce 
vice-président de la Cnil se méfie : /«Le projet Ines consiste-t-il à 
authentifier les porteurs des documents ou bien à identifier des 
inconnus dans une finalité de police judiciaire ?»/

La Ligue des droits de l'homme s'oppose à la /«constitution de bases de 
données intimes et nominatives des Français comme dans les pays 
fascistes,/ explique Me Alain Weber. /C'est un projet liberticide et 
scélérat mis en place par des apprentis sorciers qui veulent constituer 
un mégafichier de la population et considèrent tous les citoyens comme 
des suspects en puissance.»/

 
 
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